L'éditorial de Michel Guilloux.
L’austérité, ça ne marche pas. Il va falloir le dire, de plus en plus nombreux, de plus en plus fort, de plus en plus résolus aussi à échapper aux pièges de haine, de désespoir ou de division posés sous nos pas. Être solidaire du peuple grec passe par là. Car en quoi réside le courage ? À accompagner le sens du vent, quitte, par aveuglement ou calcul, à spéculer sur le pire ? Ou bien à regarder la réalité en face, en sachant que, s’il n’existe aucune recette miracle, ni aucun sauveur suprême, dire cette réalité peut ouvrir bien des chemins à sa transformation. Non, le « discours de vérité » n’est pas, dans le monde d’aujourd’hui, ce bêlement de dogmes mâtiné de fascination fétide pour la bête immonde, qui ne servent, au final, que des intérêts étroits, égoïstes et minoritaires. Il est dans la désignation de la cause réelle des maux des peuples et dans l’ouverture d’une voie avec chacun d’entre eux. C’est cela qui craquelle le vernis libéral depuis dix jours et c’est cela la victoire de Syriza en Grèce. Et il faut bien, pour ceux qui font la sourde oreille, commencer à entendre. Le ministre grec des Finances n’est pas la caricature portée par les tenants d’une guerre idéologique chauffée à blanc comme jamais. Que réclame ce gouvernement démocratiquement élu ? Quelques semaines pour un « accord qui remette à plat la situation et qui lie nos remboursements à la croissance ». « L’Europe est en crise, pas seulement la Grèce et Chypre », a rappelé hier Alexis Tsipras, qui sera reçu mercredi par François Hollande. Le chef de l’État, après son dîner strasbourgeois, est attendu sur un plat de résistance autrement plus consistant que l’onctueux conseil de Michel Sapin, dimanche : « Faire en sorte qu’enfin, en Grèce, chacun paye l’impôt… » Un peu court. Surtout quand un Barack Obama déclare : « Quand vous avez une économie qui est en chute libre, il faut qu’il y ait une stratégie de croissance, et pas seulement des efforts pour pressurer de plus en plus une population qui souffre de plus en plus. » Tic-tac, tic-tac, comme on dit aussi à Madrid.