La justice commerciale avait validé, vendredi 21 novembre 2014, l’essentiel des propositions de reprise du groupe Mobilier européen, qui comprend les enseignes Fly, Atlas et Crozatier. Bilan : un millier d’emplois supprimés sur plus de 3 600, selon le tribunal de Mulhouse (Alsace). Au total, 1 003 salariés vont perdre leur emploi, dont 128 qui se verront proposer des offres de reclassement, avait précisé de son côté un porte-parole du groupe, placé en redressement judiciaire depuis fin août. Aucun candidat ne s’étant manifesté pour la reprise globale du groupe, il sera vendu à la découpe.
Le magasin Fly de Barentin (Seine-Maritime) a ainsi fermé définitivement ses portes, laissant 30 personnes sur le carreau. Et, depuis, certains salariés se battent toujours pour obtenir leur attestation employeur, afin de bénéficier de droits aux allocations chômage. Deux salariées de Seine-Maritime ont ainsi témoigné sur France 3 Haute-Normandie :
Une lettre ouverte a également été rédigée :
« Mai 2014, des bruits courent comme quoi le groupe est en difficulté et que la barque prend l’eau ! Nous y croyons encore et restons solidaires ! Juin 2014, il est annoncé que les difficultés rencontrées seraient de plus en plus difficiles à gérer pour le groupe. On commence alors à entendre parler d’éventuelles fermetures de magasins. Nous prenons un coup de massue sur la tête. Le moral est bas, mais on va se battre. Le groupe bascule alors en plan de sauvegarde pour redresser la barre.
Juillet 2014, une liquidation est annoncée à partir du 20 août, pour faire rentrer un maximum d’argent dans les caisses et peut-être sauver nos emplois ! On se bat encore, le moral est au plus bas mais l’espoir fait vivre. Août 2014, la liquidation commence et tous les magasins travaillent comme des damnés pour faire des chiffres de fou. Avec des directives restrictives sur la marge à appliquer et bien sûr il faut garder le sourire pour les clients. Septembre 2014, on nous fait attendre. On nous dit que grâce à notre travail nous pourrions être repris mais qu’il ne faut pas baisser la garde et continuer à faire rentrer l’argent. Fatigués physiquement et surtout moralement, la direction repousse de semaines en semaines la liste noire des magasins perdus ou repris. Nous continuons de bosser en espérant être repris. Le groupe se met en redressement judiciaire.
Octobre 2014, fin de la liquidation, ça y est le magasin va fermer, aucun repreneur. Écœurés et dépités, on continue à bosser en espérant un miracle. Lorsque certains veulent faire grève et revendiquer son mécontentement, il est répondu que la direction se laisse le droit de supprimer les primes de liquidation aux grévistes. Tout ce boulot pour rien ? Alors, comme des moutons, on obéit. Et on continue de bosser dans des magasins déserts, parfois sans chauffage, électricité et sans eau car des factures n’ont pas été payées. Mi-novembre 2014, nous sommes assignés à résidence en attendant notre lettre de licenciement. Ce qui ne nous empêche pas d’être rappelés de temps en temps pour effectuer les basses besognes comme vider le magasin, le dépôt, préparer les palettes pour les soldeurs. Fin novembre, nous recevons enfin cette fameuse lettre et tout le monde souhaite passer à autre chose rapidement. Nous acceptons donc le CSP, Contrat de sécurisation professionnelle qui nous permet d’avoir un suivi Pôle Emploi spécifique aux licenciés économiques, et qui doit, normalement, nous éviter une carence et prendre le relais…
22 décembre 2014, nous sommes officiellement licenciés et le mandataire judiciaire en charge du dossier doit rapidement établir ou faire établir nos soldes de tout compte. Confiants encore une fois nous attendons. Sachant que nous devions être payés directement du 23 au 31 décembre 2014 par Pôle Emploi. Noël se passe pour tout le monde avec le sourire pour les enfants, mais c’est à peu près tout.
« Le mandataire nous dit qu’il y a un problème informatique »
Janvier 2015, pas de nouvelle du mandataire. Nous passons nos entretiens à Pôle Emploi et nous nous préparons à retrouver enfin un équilibre (moral au moins). Fin Janvier, toujours pas de nouvelle et toujours pas de solde de tout compte ni attestation employeur et par conséquent pas d’indemnisations non plus ! À ce moment, certains perçoivent un supra-légal selon leur ancienneté, ce qui redonne une bouffée d’oxygène (pour moi très petite), ceci permet à certains de faire la jonction et pallier au manque, ce qui ne devrait pas être le cas. Cela nous fait donc “patienter” encore un peu.
Février 2015, toujours pas de nouvelle. Les numéros ne répondent plus. Cela fait deux mois et demi que nous vivons avec rien. J’arrive à joindre, comme quelques collègues, le mandataire qui ne nous dit rien d’autre que de patienter, qu’il y a un problème informatique. Il nous dit qu’il n’y est pour rien et que c’est la cellule liquidative qui est en défaut. Il faut que cette cellule établisse les soldes de tout compte pour que les AGS (le régime de garantie des salaires) nous débloquent l’argent ce qui entraînera l’établissement des attestations que le mandataire devra transmettre à Pôle Emploi pour qu’enfin nous puissions être indemnisés. Nous sommes livrés à nous-même et dans l’impasse. La chose peu prendre encore plusieurs semaines pendant lesquelles nos banques, elles, n’attendront pas… »