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632.

La séquence qui vient, dans un roman russe (à supposer que), pourrait s’intituler Aventures pour un duffle-coat. L’objet, à capuche avec bouton- gravé « Denim & Supply » sortit en mars 2012 d’une gigantesque et trop réelle usine chinoise. Pour qui aime la mondialisation, elle se situera dans la lointaine province du Shaanxi, à proximité de la ville de Xian. Pour qui aime l’art archéologique, c’est à proximité qu’on mit à jour, en 1974, l’armée des huit mille statues de terre cuite de l’empereur Qin. En son temps, déjà ancien, l’écrivain Victor Segalen donna une description détaillée de l’extérieur de ce mausolée. De l’armée, l’auteur de Stèles ignorait tout.

Mais quoi, tout ça pour un duffle-coat ? Oui. De la métropole de Xian au port de Ningbo, combien de kilomètres ? Un nombre infini. Et dans cet espace comment voyagèrent les éléments de mon manteau ? Nul ne le sait. Ce qu’on sait, cependant, c’est que, entassés dans un container, ils mirent trois mois à rejoindre Le Havre, dans la petite France. Au large de Malte, voyez ses fermetures brides en jute et bâtonnets. Les marins (un équipage hybride de Philippins et de Croates) devinaient sans peine son fini classique d’inspiration nautique. Même, à tout prendre, ils l’instauraient.

L’Hydra (compagnie CMA-CGM) accosta quai de France à la fin mai 2011. De là, chargé sur un Volvo FH 540, le manteau épars, mille fois répété, traversa notre beau pays, puis l’Allemagne, l’Autriche, et finit par arriver en Roumanie. Là, à Bacau, et je vous passe les péripéties, il endossa sa forme quasi-définitive dans les ateliers des usines Octavian. Dites, quelle révélation que cette capuche avec patte de boutonnage au cou, et quatre fermetures brides en jute. Oui, nous connaissons, répliquaient les monteuses. Elles connaissaient en effet, puisqu’elles étaient chinoises et ouvrières, expatriées là pour les besoin d’une société italienne.

Des choses pareilles ne s’inventent pas. Si oui, il le faudrait. Encore quelques semaines et d’autres voyages. L’épopée presque. Enfin, le manteau aboutit dans le quartier du Sentier, rue Tiquetonne, aux 8 et 10, adresse des entrepôts des frères Werbrust, ces derniers déjà rencontrés chez Balzac. Là, à la lumière de néons aveuglants, et jusqu’à l’épuisement, un mince personnage nanti d’un légitime propriétaire, vinrent passer commande et livraison. A ce moment, le duffle-coat montrait-il cette teinte gris-vert qui lui donnera cet irrépressible attrait ? On ne sait. Il faut savoir, néanmoins, que gris-vert n’est pas vert de gris comme faillit le commenter un imprudent acheteur.

N’anticipons pas. A la rentrée universitaire 2013, le manteau fut acheté dans une admirable boutique du quartier du Marais. L’étiquette ? Pas très loin de 900 euros. Autant dire, pas une dépouille de mendiant. L’acheteuse paya par carte bancaire. Parait-il, une dame d’un certain âge (tout est relatif, réplique la vendeuse) habitant loin, du côté de Boulogne, dans un immeuble construit par Fernand Pouillon (autre histoire à raconter), bref, à qui il fallut livrer le manteau. L’habilité serait d’écrire : à partir de là, on perd sa trace. Du manteau ou de la dame ?

La séquence qui vient, dans un roman russe (à supposer que), pourrait s’intituler Aventures pour un duffle-coat. L’objet, à capuche avec bouton- gravé « Denim & Supply » sortit en mars 2012 d’une gigantesque et trop réelle usine chinoise. Pour qui aime la mondialisation, elle se situera dans la lointaine province du Shaanxi, à proximité de la ville de Xian. Pour qui aime l’art archéologique, c’est à proximité qu’on mit à jour, en 1974, l’armée des huit mille statues de terre cuite de l’empereur Qin. En son temps, déjà ancien, l’écrivain Victor Segalen donna une description détaillée de l'extérieur de ce mausolée. De l’armée, l’auteur de Stèles ignorait tout.

Mais quoi, tout ça pour un duffle-coat ? Oui. De la métropole de Xian au port de Ningbo, combien de kilomètres ? Un nombre infini. Et dans cet espace comment voyagèrent les éléments de mon manteau ? Nul ne le sait. Ce qu’on sait, cependant, c’est que, entassés dans un container, ils mirent trois mois à rejoindre Le Havre, dans la petite France. Au large de Malte, voyez ses fermetures brides en jute et bâtonnets. Les marins (un équipage hybride de Philippins et de Croates) devinaient sans peine son fini classique d'inspiration nautique. Même, à tout prendre, ils l’instauraient.

L’Hydra (compagnie CMA-CGM) accosta quai de France à la fin mai 2011. De là, chargé sur un Volvo FH 540, le manteau épars, mille fois répété, traversa notre beau pays, puis l’Allemagne, l’Autriche, et finit par arriver en Roumanie. Là, à Bacau, et je vous passe les péripéties, il endossa sa forme quasi-définitive dans les ateliers des usines Octavian. Dites, quelle révélation que cette capuche avec patte de boutonnage au cou, et quatre fermetures brides en jute. Oui, nous connaissons, répliquaient les monteuses. Elles connaissaient en effet, puisqu’elles étaient chinoises et ouvrières, expatriées là pour les besoin d’une société italienne.

Des choses pareilles ne s’inventent pas. Si oui, il le faudrait. Encore quelques semaines et d’autres voyages. L’épopée presque. Enfin, le manteau aboutit dans le quartier du Sentier, rue Tiquetonne, aux 8 et 10, adresse des entrepôts des frères Werbrust, ces derniers déjà rencontrés chez Balzac. Là, à la lumière de néons aveuglants, et jusqu’à l’épuisement, un mince personnage nanti d’un légitime propriétaire, vinrent passer commande et livraison. A ce moment, le duffle-coat montrait-il cette teinte gris-vert qui lui donnera cet irrépressible attrait ? On ne sait. Il faut savoir, néanmoins, que gris-vert n’est pas vert de gris comme faillit le commenter un imprudent acheteur.

N’anticipons pas. A la rentrée universitaire 2013, le manteau fut acheté dans une admirable boutique du quartier du Marais. L’étiquette ? Pas très loin de 900 euros. Autant dire, pas une dépouille de mendiant. L’acheteuse paya par carte bancaire. Parait-il, une dame d’un certain âge (tout est relatif, réplique la vendeuse) habitant loin, du côté de Boulogne, dans un immeuble construit par Fernand Pouillon (autre histoire à raconter), bref, à qui il fallut livrer le manteau. L’habilité serait d’écrire : à partir de là, on perd sa trace. Du manteau ou de la dame ?