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Le Volcan du Havre ouvre ses portes au spectacle vivant du 21ème siècle

(fil-fax 07/01/15) Le 7 janvier, le concert inaugural du Volcan Niemeyer, scène nationale du Havre qui reprend son activité après plus de trois ans et 50 millions de travaux, sera symbolique : Jean-Claude Casadesus le dirigera, Honegger, Dutilleux et Brahms au … Lire la suite

(fil-fax 07/01/15)

Le 7 janvier, le concert inaugural du Volcan Niemeyer, scène nationale du Havre qui reprend son activité après plus de trois ans et 50 millions de travaux, sera symbolique : Jean-Claude Casadesus le dirigera, Honegger, Dutilleux et Brahms au programme. Le chef de l’orchestre national de Lille l’avait inauguré en 1982 mais avait alors dénoncé « un véritable forfait acousticide ». Demain, il devrait être heureux : la salle de spectacle flambant neuve a été spécialement reconfigurée pour une programmation musicale. Mais ce chantier n’a pas consisté à seulement réhabiliter deux édifices usés par le temps. L’ensemble du site conçu par l’architecte brésilien a été totalement remodelé pour être mieux relié à son environnement urbain.

La première Maison de la culture en France ouverte au Havre par Malraux en 1961, dans le musée des Beaux-Arts, s’est installée en 1982 en centre-ville, à l’emplacement de l’ancien Grand Théâtre détruit sous les bombardements de 1944. Avec ses deux cratères de béton tout en courbes, une prouesse technique, le site est symbolique du renouveau urbain : mandaté par le maire communiste André Duroméa, Oscar Niemeyer crée la rupture avec la ville géométrique de Perret, depuis classée Patrimoine mondial de l’Unesco. Longtemps décrié par les Havrais, le « pot de yaourt » baptisé Le Volcan par son directeur Alain Milianti mise sur la diversité des genres. On y voit des cirques, des films, de la danse, du théâtre.

Mais un béton vieillissant, des normes de sécurité obsolètes, des charges trop lourdes, une structure inadaptée aux nouvelles formes de spectacle vivant: il a fallu rénover. Et surtout, le maire UMP Antoine Rufenacht a voulu redonner accessibilité et visibilité au site déserté. Il fait valider son projet à Rio par Niemeyer. Fermé en 2011 pour le grand lifting, le Volcan se transporte dans l’ancienne gare maritime transatlantique. L’architecte Deshoulières ouvre le site, crée de nouveaux accès en pavements de granit. Le Grand Volcan repeint en blanc offre davantage de convivialité et de lumière naturelle (habillage de bois de châtaignier, foyer pour concerts de jazz, ouvertures). Il offre une grande salle (820 fauteuils) modernisée, avec un plafond modulable s’adaptant au spectacle donné et une petite salle dédiée jeune public. Le Petit Volcan deviendra une bibliothèque, ouverte en septembre. Reste encore à ouvrir un autre Volcan, lieu de résidence et de répétition. La Ville cherche un lieu. Avec un budget de 4,9 M€, 32 permanents, plus de musique, plus de danse, son directeur Jean-François Driant assure: ce nouveau théâtre permettra de « restituer la dimension patrimoniale de la culture», pour « le plus grand nombre ». On verra donc Le Bourgeois gentilhomme de Podalydès, le Cyrano de Lavaudant, le ballet Giselle, Gallotta et la dernière pièce de Robert Lepage comme la première mondiale du Japonais Shiro Takatani.

• www.levolcan.com

Une réhabilitation controversée

L’association Docomomo (DOcumentation et COnservation des édifices, sites et ensembles urbains du MOuvement MOderne) France dénonce la « trahison » de l’esprit d’origine. En juillet 2013, l’association a alerté le comité du patrimoine mondial de l’Unesco et demandé l’arrêt des travaux qui «obèrent gravement le caractère authentique et universel de l’œuvre de Niemeyer ». Parmi les points contestés, selon Raphaëlle Saint-Pierre, de Docomomo : l’ouverture du site sur la ville qui dénature l’aspect « clos et protégé » voulu par l’architecte brésilien et qui « cache les lignes », l’inversion de la rampe hélicoïdale reliant la place haute à la place basse, le blocage des circulations par les baies vitrées, le remplacement du béton des sols extérieurs par des dalles de granit, le percement de la coque pour des ouvertures qui ne sont « sûrement pas autorisées par le permis de construire », le remplacement du Petit Volcan par une médiathèque, et, récente, l’installation du dispositif de désenfumage sur le toit du Grand Volcan. « On doit pouvoir restaurer des lieux sans les dénaturer ! » Agnès Cailliau, présidente de Docomomo, déplore la « dépendance grandissante des services territoriaux de l’architecture et du patrimoine (STAPs) aux politiques qui ne respectent pas le patrimoine contemporain ». Pour l’architecte Dominique Deshouilières, « l’architecture, quelque soit son siècle, n’est pas faite pour être figée ».